dimanche 23 février 2014

Docteur mais bien sûr ...

Jeudi matin 10h00.
Je marchais de long en large dans mon bureau.
J'avais pesé le pour et le contre toute la nuit en me demandant si je n'allais pas faire une bêtise en prenant un café avec le Dr Clark.
Qu'avait bien voulu dire Sam en insinuant que Vince n'était pas un vrai médecin ? J'avais beau retourner tous les éléments que je possédais dans tous les sens, je ne voyais pas où les choses clochaient. J'avais fait des recherches sur internet pour voir si je trouvais des articles sur lui dans la littérature scientifique. J'en avais trouvé une bonne quantité à propos d'un essai clinique qu'il avait mené dans un hôpital de New York avant de venir s'installer au Royaume Uni. Les résultats de cet essai avaient été plus que prometteurs. Son protocole avec son tout nouveau médicament semblait relever du miracle, 85 % de ses patients avaient vu leur état s'améliorer de façon spectaculaire. Alors poussée par davantage de curiosité, j'étais arrivée tôt à l'hôpital ce matin. J'avais graissé la patte de la secrétaire qui s'occupe des dossiers du personnel histoire de pouvoir jeter un oeil à celui de Vince. S'il y avait une faille dans ses diplômes, un élément bizarre apparaîtrait forcément quelque part. Heureusement que Bridget, la secrétaire, ne résistait pas longtemps à un ballotin de chocolat noir. J'avais donc pu consulter son dossier à loisir.
Né en 1976 à Boston. Études de médecine à New York où il sort major de sa promotion. Premier emploi offert sur un plateau dans la même ville où il reste jusqu'en 2012. De là il exerce à Londres, nouvel essai clinique encourageant sur la maladie d'Alzheimer. Puis en 2014, recrutement par l'hôpital de Cambridge où on lui propose le poste de chef de service de neurologie.
Que du politiquement correct. Voilà qui n'éclairait pas davantage ma lanterne. Je pris donc ma pause à 12h00 et décidai de passer directement à l'offensive. Direction le bureau du docteur Clark !
Je pris soin d'emporter avec moi deux gobelets de café pris à la machine automatique du rez de chaussée. J'allais tant bien que mal toquer à la porte de son bureau. Aucun patient dans la salle d'attente, il devait avoir fini ses consultations. Aucune réponse. J'arborai mon plus beau sourire et retournai vers la réception du service de neuro. La secrétaire avait aussi déserté les lieux. Un écriteau affichait retour à 13h00.
Me voilà bien avec mes deux cafés. j'avalai le mien histoire de me libérer une main. Je parcourus les couloirs du service de neurologie à sa recherche. Je croisai une infirmière qui par chance, m'indiqua qu'il était allé faire la tournée quotidienne de ses patients.
- Logiquement il doit être au 3e étage, chambre 304, m'informa la grande brune en uniforme qui me faisait face.
- Merci bien.
- Surtout ne faites pas trop de bruit avec le Dr Clark. Le patient qui est dans cet chambre, se trouve dans un état critique.
Elle me fit un clin d'oeil entendu et puis repartit au bureau des infirmières au bout du couloir.
Visiblement, le colloque de mardi avait déjà fait circuler son lot de ragots. Je n'allais tout de même pas sauter sur Vince Clark dans la chambre d'un patient si c'est ce que cette grande perche insinuait. Et puis d'abord, j'étais habillée sous ma blouse, moi ! Ce qui n'était pas toujours forcément le cas de Suzie, hum ....
J'arrivai donc devant la porte de la chambre 304. Je ramenai une mèche de cheveux derrière mon oreille droite, histoire de me donner une contenance. J'avais toujours le second gobelet de café à la main.
Je m'apprêtais à frapper à la porte lorsque je m'aperçus qu'elle était entrebaillée. De ce que je pouvais en voir, la pièce était plongée dans la pénombre, juste une veilleuse au dessus du lit donnait un peu de lumière. Le moniteur cardiaque du patient bipait régulièrement.
Vince était de dos. Avec sa grande blouse blanche, il semblait immense
Je supposai qu'il vérifiait le dossier du patient, visiblement il lisait quelque chose.
Tout à coup je l'entendis marmonner dans un langage inconnu. Je restai ainsi à l'écouter quelques minutes complètement médusée. Il était en train de réciter des espèces d'incantations et de tracer des signes cabalistiques dans l'air. J'en eus le souffle coupé et lâchai le café sur le sol.
Décidément rien ne me tenait dans les mains !
Le bruit fit sursauter Vince qui se retourna aussitôt. Comprenant que j'avais vu ce que je n'étais pas censée voir, il fit une grimace comme quelqu'un prit sur le fait avec les doigts dans le pot de nut.
Sam avait donc raison sur un point. Vince ne pratiquait pas que de la médecine, Mais qu'est-ce qu'il pouvait faire à ce pauvre malade allongé sur son lit d'hôpital ?
Mon imagination cavalait mais mes jambes furent plus rapides que mon cerveau, je m'enfuis en courant sans me retourner comme si j'avais le diable à mes trousses.

A suivre ...

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