dimanche 23 mars 2014

Entretien avec un déchu.

Quelque part au milieu du parc de la ville, sous le couvert des arbres.
- Pourquoi lui avoir parlé ? Quel est votre intérêt de remuer toute cette boue ?
- Mais enfin très cher, il faut bien que la vérité triomphe ! On me prend toujours pour le bourreau de service, ce qui n'est pas si faux mais j'ai tout de même une réputation à préserver. J'ai horreur qu'on me mette tout sur le dos ! J'exécute les ordres des hautes instances mais je ne mets jamais personne à mort pour le plaisir. La réduire en cendres a été un gâchis pour vous, pour Elle, pour l'autre, pour moi. Même le Grand Patron n'a pas vu cela d'un très bon oeil mais il a laissé faire le Conseil des Cinq.
- Au bout de 400 ans, l'eau a tout de même coulé sous les ponts.
- Pour moi comme pour vous, les siècles n'ont aucune importance. Tout est toujours aussi vivace.
- Mmm ...
- Vous savez très bien que j'ai raison même si la mémoire fait parfois défaut sur ce qui nous dérange le plus.
- Sauf que quand elle saura ce que j'ai fait, même si c'était par amour, elle me détestera et mettra un point d'honneur à me massacrer et l'autre l'y aidera.
- C'est à vos risques et périls mon vieux, de toute façon, vos actes vous ont déjà tué à petit feu depuis quatre siècles, il est tant d'alléger votre conscience et que la vérité éclate. Je doute en effet qu'elle vous pardonne mais cela vous laissera l'occasion de vous expliquer.
- Encore faudrait-il qu'elle m'en laisse le temps ! Mais je garde tout de même l'espoir de la conquérir, il se peut qu'elle change d'avis en ce qui me concerne, je ne suis plus le même homme qu'avant.
Van Helsing eut un rire sinistre.
- Mon cher, ne vous leurrez pas, on reste toujours tel que l'on est. Quand on a trahi une fois, on trahit toujours !
                                                                  ***
Je ne m'étais pas aperçue que j'avais couru aussi loin. Lorsque j'arrivai enfin à la maison, l'averse m'avait littéralement trempée. Mes cheveux étaient plaqués sur mon visage, je détestais ça. Je me déchaussai rapidement pour ne pas mettre de la boue plein l'entrée. Et tant que j'y étais, j'enlevai dans la foulée mon sweat et mon t-shirt qui étaient bons à tordre. Je me rendis dans la chambre pour prendre des vêtements propres avant de filer sous la douche quand je trouvai Sam affalé sur mon lit en train de lire le carnet de Nora Elizabeth.
- Encore vous ?! m'exaspérai-je.
- Charmant spectacle, répondit-il avec un sourire carnassier.
Je pris conscience que je me baladais en soutif et pantalon de survêtement, voilà qui n'était pas terrible pour me donner de l'aplomb et le renvoyer à ses études !
- Si vous le dites ! Sam, est-ce qu'il vous arrive de vous comporter comme quelqu'un de normal ? De sonner à la porte ou de téléphoner avant de venir ?
Sam leva le doigt et fit semblant d'appuyer sur un bouton imaginaire.
- Ding dong ! Est-ce que cela vous convient ?
- Pfff, vous m'agacez ! Je vais prendre une douche, quand je ressortirai de la salle de bain, faites moi le plaisir d'avoir décampé de mon lit ! Et laissez ce carnet tranquille, ajoutai-je en le lui prenant des mains.
- Bien madame ! Comme il plaira à madame ! se moqua-t-il.
Je tournai les talons et partis m'enfermer dans la salle de bain en bougonnant.
Je fis couler de l'eau brûlante et me savonnai énergiquement. J'étais frigorifiée par la pluie qui avait traversée mes vêtements, mes muscles en étaient douloureux.
Je sortis de la douche, m'enroulai dans une serviette et m'approchai du lavabo pour prendre de quoi me démêler les cheveux. Ce ne fut qu'à l'instant où je relevai le visage vers le miroir que je m'aperçus que Sam se trouvait aussi dans la salle de bain.
Je levai les yeux au ciel et m'apprêtai à pousser une bonne gueulante lorsqu'il avança à pas de loups pour me dessaisir de mon peigne et de ma bouteille de soin sans rinçage.
Sam mit un index sur mes lèvres pour m'intimer le silence et il me fit pivoter vers le miroir. Je me demandais bien ce qu'il allait inventer. Il dévissa la bouteille, prit une noisette de produit qu'il étala soigneusement sur mes longues boucles châtain.
Puis il empoigna le peigne et entreprit de démêler ma chevelure mèche à mèche. Forcément il avait l'habitude de ce genre de corvée vu la tignasse qu'il se payait !Je ne pensais pas qu'il puisse faire cela aussi délicatement, il ne m'arracha ni un cheveu, ni une protestation ! Mais bon sang, pourquoi est-ce que je le laissais faire ? Si ça se trouve c'est lui qui avait précipité Nora Elizabeth dans le feu et moi je faisais quoi au lieu de lui arracher des aveux ou de lui coller une droite ? Je le laissais jouer au coiffeur ! Hallucinant ! Maman disait toujours qu'on accusait pas sans preuve, alors il fallait bien laisser le bénéfice du doute jusqu'à preuve du contraire.
Bénéfice du doute mon oeil, avoue Nora, t'en ferais bien ton quatre heures du Sam hein ?!La salle de bain embaumait le vétiver. Il fallait bien admettre que c'était agréable de se faire chouchouter, même si c'était par un ange déchu super sexy et traitre potentiel, je n'aurais pas échangé les cinq dernières minutes pour un billet gagnant de la loterie.
Sam entortilla mes cheveux pour les relever en chignon sur le dessus de ma tête à l'aide d'une grosse pince. Il examina la tablette du lavabo puis sourit en empoignant la bouteille de crème pour corps. Non il n'allait tout de même pas se mettre à tartiner ma peau ?!
Je fronçai les sourcils mais il hocha la tête avec un sourire tellement ravageur que je ne protestai pas non plus. Du moment que je gardais ma serviette c'était l'essentiel !Il commença par un bras en remontant doucement du poignet vers l'épaule, puis fit de même avec l'autre bras. Je ne pus réprimer un frisson lorsqu'il entreprit d'étaler la crème sur le haut de mon dos et ma nuque qu'il massa délicatement. La serviette était en train de glisser dangereusement et je la retins afin de ne pas perdre toute dignité. L'honneur était sauf au moins en ce qui concernait la partie face de mon anatomie, parce-que la partie pile était ... à poil !Les mains expertes de Sam s'aventurèrent vers ma chute de reins, il procédait par subtils effleurements. Je me mordis la lèvre inférieure, là il me rendait totalement dingue, je laissai échapper un soupir malgré moi. Je m'agrippai à ma serviette le temps qu'il dépasse mon popotin sur lequel il s'attarda plus que de raison, pour finir sur toute la longueur des jambes jusqu'aux chevilles. Je vis dans le miroir le reflet du grand ténébreux remonter à ma hauteur. Puis il se inclina doucement ma tête sur le côté afin de déposer dans mon cou de petits baisers savamment dosés. Punaise Nora, tu perds les pédales ma vieille, réveilles-toi ! D'ici trois minutes tu vas signer un pacte avec le grand fourchu si tu continues !
-
Alors Miss Chester, votre lecture a-t-elle été enrichissante ? murmura-t-il en continuant son petit manège.
- Très, articulai-je difficilement.
- Qu'avez-vous appris d'intéressant ?
- Que mon ancêtre était une femme très convoitée ...
- ... tout comme vous ma beauté, souffla-t-il à mon oreille.
- Euh ... ah bon ... si vous le dites ... mais vous n'êtes pas très objectif, si ?!
- Remettriez-vous mon jugement en question Miss Chester ? fit-il d'une voix de velours.
Il continua à promener ses lèvres jusqu'à mon épaule.
Mon Dieu sauvez-moi il va me faire craquer et je ne peux pas craquer maintenant ! Pas tant que j'ignore tout ce qui s'est passé !
-
Non pas du tout, pépiai-je.
- Je préfère ça.
- J'ai aussi appris qu'elle n'était pas insensible à votre charme, ni à celui de Vince. Et qu'elle a passé une nuit avec l'un de vous deux sauf que ...
- Sauf que ?
- J'ignore avec qui !
Sam releva la tête, ses yeux brillaient anormalement.
- Et vous mourrez d'envie de le savoir, dit-il taquin.
- Mais je sais très bien que vous ne me direz rien.
- Vous devinez juste ma beauté.
Sam enlaça ma taille et vint coller sa joue contre la mienne. Cette proximité qui aurait dû être dérangeante, me semblait étrangement familière.
- Pourquoi cela ? insistai-je.
- Tout simplement parce-que vous n'avez pas trouvé l'élément premier qui vous fera dénouer tout le fil de l'histoire. Nora, partez du principe que vous êtes comme une victime amnésique et qu'il vous faut retrouver tous les indices afin de reformer le puzzle. Impossible d'aller trop vite sinon votre cerveau disjonctera.
- Mais enfin qu'est-ce que vous avez tous à me dire que j'ai loupé le principal dans ce carnet ? Van Helsing m'a sorti la même chose il n'y a pas une heure, vous vous êtes donnés le mot ou quoi ?!
- De connivence avec ce fieffé menteur ? Il faudrait me payer cher même si sur le fond, il n'a pas tort. Mais un conseil ma beauté, ne prenez pas au pied de la lettre tout ce qu'il a pu vous dire, il aime beaucoup embobiner les gens de façon à ce qu'ils ne fassent plus confiance à personne.
Je hochai la tête.
- Je vois ça oui. Il m'a dit que l'un de vous deux est un traître.
Sam ne cilla pas.
- Et vous l'avez cru ?
- Disons que sa théorie se tient.
- Je préfèrerais que vous vous fassiez plutôt votre propre idée à la lumière des éléments dont vous disposez.
- J'y compte bien.
- Croyez-vous que je sois le traître ? chuchota-t-il à mon oreille.
Il me posait une sacrée colle, j'étais incapable de lui donner une réponse.
- Je l'ignore mais je le saurai bientôt, je l'espère.
- Alors tenez-moi au courant.
Sam déposa un tendre baiser sur ma tempe et disparut de la salle de bain.


A suivre ...

4 commentaires:

  1. De plus en plus intéressant !!

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  2. J'ai le cerveau embrouillé

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  3. Audrey : tant mieux suis contente quand j'arrive à rendre mes lecteurs accros !

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  4. Ysa : pourquoi embrouillé ? Je t'ai perdue en route ou alors t'as zappé un épisode ?!

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