samedi 1 mars 2014

Le traqueur

Comment avais-je fait mon compte pour que deux types, mecs, monstres (quoique bien trop sexy pour être des monstres), immortels, pas humains, me tombent dessus sans que je ne vienne rien demander à personne ?
J'avoue que le lien logique me manquait singulièrement. Je passai une nuit agitée, carrément peuplée de rêves loufoques. Dans un de mes songes, Sam et Vince étaient réunis dans un cimetière sous la pluie. Ils se disputaient pour savoir qui des deux savait le mieux arrêter les gouttes, mais le pire c'est qu'après ils en étaient venus à se balancer des éclairs dans la tronche pour savoir qui serait le plus compétent pour faire passer mon mal de tête ! Un vrai combat de coqs !
Et dans le second rêve dont je me souvenais, j'étais cette fois dans une église en robe de mariée et ils se disputaient encore. L'un voulait absolument me faire signer un contrat avec le Diable et l'autre voulait que je donne d'abord mon sang pour sa potion magique avant que je prononce le oui fatidique devant l'autel.
Heureusement Win vint me réveiller en miaulant avant que je ne devienne complètement dingue.
Je filai sous la douche, fatiguée comme jamais. J'avais le cerveau complètement à l'envers. Je ne savais plus à qui me fier, ma logique cartésienne ici ne m'était plus d'aucun secours. L'eau chaude ruisselait sur mon corps depuis un bon moment, il fallait que je m'arrache de la salle de bain pour aller travailler. Des patients avaient besoin de moi. De vrais patients bien humains, avec de vrais problèmes. Le pied !!!
Il était encore tôt lorsque je partis de la maison. Je décidai de faire un crochet par le garage de Mike histoire d'aller lui secouer les puces.
A 8h00 pétantes, j'entrai dans son atelier. Il était déjà à l'oeuvre sous une voiture montée sur le pont.
- Eh oh espèce de faignant ! Sors de là il faut que je te parle !
Mike sortit de dessous le véhicule, les mains noircies par le cambouis et un sourire jusqu'aux oreilles.
- Tiens voilà la plus belle qui vient récupérer son carrosse. Bonjour quand même ! ajouta-t-il sans pour autant perdre sa bonne humeur.
- Oui bonjour, pardon !
Si en plus la politesse m'abandonnait, c'était la fin des haricots...
As-tu fini la réparation ? J'en ai marre de me faire rincer tous jours par la pluie !
- Figures-toi qu'il me manque une pièce pour finir le travail. J'ai passé la commande, mais ça tarde à arriver.
- Rhooo mais combien de temps ça va encore durer cette histoire ?
- Désolée ma belle, mais ta pompe à gasoil est morte et trouver la pièce de remplacement sur une Austin aussi vieille que la tienne, c'est pas gagné ! Tu ferais aussi bien de la mettre à la casse et de t'en racheter une autre.
- Ah non Mike, ne me sape pas le moral dès le matin. Tu sais très bien à quel point je tiens à cette voiture. C'est le dernier cadeau que mon père m'ait fait, donc fais les brocantes s'il le faut mais trouve moi cette pièce de remplacement.
Je lui lançai un regard implorant.
- T'inquiète donc pas, je fais de mon mieux pour que tu récupères ton pot de yaourt au plus vite. Je ne peux rien te refuser, tu le sais bien.
Je hochai la tête. Il était temps que je parte retrouver mes patients. Et puis quand Mike commençait à me dire qu'il pouvait tout faire pour moi, l'invitation à dîner n'allait pas tarder et je n'avais pas envie d'entendre ça maintenant.
- Merci Mike. Tiens moi au courant. A plus tard ! lançai-je avant de tourner les talons.
J'arrivai une nouvelle fois au bureau trempée. Bientôt je me rendrais au travail en combinaison de plongée si le mauvais temps continuait sur cette lancée.
Pas de message d'annulation sur le répondeur, personne n'allait me faire faux bond aujourd'hui. Chouette ! Ma journée serait bien remplie et je pourrais éviter de penser aux deux autres zigotos qui me prenaient la tête de jour comme de nuit.
Mon regard s'arrêta un instant sur mon bureau. Une grande enveloppe kraft plutôt lourde y était déposée. Je l'ouvris avec précaution, redoutant ce que je pourrais y trouver. J'en sortis un livre et un message.
"Pour parfaire votre culture générale. On en reparle plus tard. Sam."
Le livre s'intitulait Anges et Démons pour les nuls.
Je piquai un fou rire et m'affalai sur ma chaise pour reprendre mon souffle.  
Sacré Sam !
Mon premier patient me fit revenir à la réalité en sonnant à l'interphone. La réalité reprenait ses droits et jusqu'à 11h00 tout se passa comme sur des roulettes.
Dépression, divorce difficile, deuil, crise d'ado, des patients tout ce qu'il y a de plus normaux. Un véritable havre de paix dans le tumulte de la semaine.
Sauf que ... quelqu'un sonna à 11h00 alors que j'avais cru à une blague lors de la prise de rendez-vous.
J'ouvris la porte de mon bureau pour accueillir le nouveau venu. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre mais je fus surprise par la jeunesse de cet homme qui pourtant avait les cheveux gris. Il avait tout au plus une petite quarantaine d'années à vue de nez. Habillé élégamment, on aurait pu croire qu'il sortait d'une réunion de travail.
- Installez vous monsieur Van Helsing, dis-je en désignant le divan qui recevait habituellement mes patients.
- Merci Miss Chester, dit-il d'un ton aimable.
Je pris place sur le fauteuil près du divan comme à mon habitude. Calepin et stylo en main, j'entamai l'entretien préliminaire à toute thérapie.
- Pourquoi êtes vous venu me voir ?
- D'après vous ?
- Monsieur Van Helsing, il existe tout un tas de motifs pour lesquels vous seriez susceptible de venir me voir : dépression, problème de personnalité, deuil non fait, difficultés au travail ... La liste est longue. A vous de m'orienter dans la bonne direction.
Il me lança un regard bleu glacial qui contrastait avec le ton de sa voix plutôt chaleureuse au départ.
- Si je vous parle de créatures obscures Miss Chester, allez vous me suivre sur ce terrain ?
Je restai dubitative, et l'incitai à poursuivre par un geste vague de la main.
- Bien je vois que nous avons les mêmes fréquentations.
- Tout est relatif, me permis-je d'intervenir.
Gabriel Van Helsing me lança un regard en coin.
- Savez-vous quel est mon métier Miss Chester ?
- Pas le moins du monde ! mentis-je effrontément.
- Admettons. Alors, je vais éclairer votre lanterne. Je suis chasseur de créatures obscures, démons, vampires, bref de toutes les espèces qui polluent l'humanité.
- Voilà une activité pas banale.
Je me raclai la gorge. Tout cela sentait les ennuis à plein nez.
- Cela ne me dit pas quel est le but de votre visite ? Vous vivez mal votre "métier"? dis-je en jouant l'imbécile une nouvelle fois.
- Miss Chester, arrêtez de jouer les naïves voulez-vous ? Je sais que vous avez parmi votre patientelle tout un tas d'individus peu recommandables, dont deux en particulier. Deux hommes, un sorcier et un ange déchu.
Une goutte de sueur froide dégoulina le long de ma colonne vertébrale.
- Vous savez que je suis tenue au secret professionnel, je ne vous révèlerai rien aux sujets de mes patients.
Nora, ne flanche pas, ce type cherche à te pousser au faux pas ! Surtout ne rien lâcher !
- Je le sais pertinemment Miss Chester, mais juste à titre informatif, j'enquête sur ces deux lascars, et je me ferai une joie non dissimulée de les empêcher de nuire.
Les plus hautes instances m'ont chargé d'une mission très importante et je compte bien l'accomplir. Votre aide me serait précieuse. Cela dit, si j'apprends que vous fricotez avec "l'ennemi", je ne ferai pas de quartier avec vous. Vous serez éradiquée de la même façon qu'eux pour collaboration avec des forces obscures.
Je vous ai à l'oeil Miss Chester !
Sur ces paroles menaçantes, il se leva du canapé. lissa sa veste de costume et quitta la pièce sans même se retourner. J'en restai coite.
Je le suivis du regard jusqu'à ce que j'entende la porte du cabinet se refermer.
Je poussai un ouf de soulagement, il était parti.
Vince avait raison finalement, j'avais non pas de gros, mais d'énormes problèmes !


A suivre ....

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